Sourde de naissance, Stefany Krebs a surmonté les obstacles pour s’imposer comme footballeuse professionnelle au sein de l’élite brésilienne.
Au Brésil, la première phase du Championnat de foot féminin vient de s’achever : si le Corinthians a fini (comme souvent) en tête, le promu Palmeiras, cinquième, a fait office de bonne surprise. Dans ses rangs, Stefany Krebs, 22 ans, milieu de terrain et sourde de naissance. Une rareté dans le sport de haut niveau – le nageur sud-africain Terence Parkin, vice-champion olympique du 200m brasse en 2000, ou le joueur de tennis sud-coréen Lee Duck-hee, 253e mondial, font figure d’exception – en particulier dans les disciplines collectives où la communication entre partenaires est primordiale.
Pour Krebs, folle de foot depuis l’enfance et dont le frère, malentendant également, n’a pu passer pro en raison de son handicap, la route a été difficile. À 15 ans, partie tenter sa chance seule dans un club (Santa Catarina) loin de chez elle, elle faillit renoncer à son rêve. « Il n’y avait personne pour m’expliquer les choses en langue des signes. Je me suis parfois sentie très seule, racontait la jeune femme au site de la FIFA le mois dernier. J’avais le coeur brisé, j’étais prête à abandonner. J’avais le sentiment que les sourds n’avaient pas leur place sur le terrain. Je n’avais pas la moindre idée de ce que j’allais devenir. »
Les supporters l’accueillent d’un « félicitations » exprimé en langue des signes
Encouragée par sa famille, elle persévère et se fait remarquer lors de la Coupe du monde de futsal des sourds, dont elle est élue à deux reprises (2015 et 2017) meilleure jeune joueuse de la compétition et qu’elle remporte la deuxième fois. Convaincu par son talent, le préparateur physique de la sélection noue alors des contacts avec Palmeiras, où il travaille aussi. « Quand il m’a annoncé la nouvelle, j’ai cru que c’était une blague », se souvient-elle. La Brésilienne ne rêve pas. En janvier dernier, elle a été présentée, aux côtés de l’internationale brésilienne Rosana, aux 2 000 supporters de l’Allianz Parque qui l’ont accueillie d’un « félicitations » exprimé en langue des signes. « J’étais très émue, c’était tellement beau, j’avais l’impression de faire partie d’une famille… »
La jeune malentendante multiplie les efforts pour gagner sa place. « Chaque jour, j’arrive trente minutes avant les autres pour consulter le programme de l’entraînement et soulever d’éventuels problèmes. » Avec ses coéquipières, « qui crient beaucoup tandis que les sourdes préfèrent utiliser les gestes, nous trouvons nos marques petit à petit ». En quinze journées, Stefany Krebs a joué trois matches. Elle qui rêve de porter un jour le maillot de la Seleçao et d’évoluer à l’étranger espère que l’histoire ne fait que commencer.